La réforme du code minier, dans les cartons depuis une dizaine d'années, pourrait enfin aboutir. Les députés ont adopté en première lecture ce vendredi 9 avril les dispositions du projet de loi climat qui l'autorise.
Le dispositif adopté par les députés est à deux niveaux. Le projet de loi contient des dispositions « en dur » qui portent sur l'encadrement des travaux miniers, les modalités d'arrêt de ces travaux et la responsabilité des exploitants après arrêt. Mais la réforme repose, pour une grosse part, sur des ordonnances que le Gouvernement devra prendre dans un délai de 18 mois. Ce qui suscitait l'inquiétude des associations de protection de l'environnement. « Le risque est celui d'un report de la réforme au prochain quinquennat », expliquait ainsi Pierre Cannet, directeur du plaidoyer du WWF France, à l'issue de l'examen du texte en commission. Mais la majorité a accepté de faire un geste en direction des partisans d'une réforme plus rapide et d'apporter davantage de garanties environnementales.
« Garanties essentielles »
L'exécutif a en effet accepté d'inscrire dans la loi, sans attendre les ordonnances, trois importantes dispositions : soumettre les titres miniers à une analyse économique, environnementale et sociale ; permettre le refus d'un titre minier pour des raisons environnementales ; inclure les titres miniers dans le régime du plein-contentieux.
« Nous ne pouvons que nous réjouir de ne pas avoir à attendre la publication des futures ordonnances pour introduire dans le droit minier des garanties aussi essentielles que la réalisation d'une analyse économique, sociale et environnementale, le renforcement des consultations et de la participation du public, et la possibilité de refuser l'octroi d'un titre en cas de doute sérieux sur les menaces qu'un projet pourrait représenter pour les intérêts protégés, sans attendre l'étape de la demande d'ouverture des travaux miniers », s'est félicité le rapporteur LReM Damien Adam.
Les députés ont également adopté une disposition prévoyant l'élaboration d'une politique nationale des ressources et des usages du sous-sol. Ils ont en revanche supprimé le Conseil national des mines dont la création avait été actée en commission. La députée LReM Stéphanie Kerbarh, qui avait proposé cette création, déplore, avec cette suppression, « l'absence d'espace de concertation sur l'élaboration de la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol, et sur la politique de recyclage des matériaux secondaires ».
Lutter contre l'orpaillage illégal en Guyane
Les députés ont adopté plusieurs amendements visant à renforcer la lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane. Les sanctions pénales sont renforcées avec des peines pouvant atteindre 5 ans de prison et 100 000 euros d'amende pour les orpailleurs illégaux, 10 ans de prison et 4,5 millions d'euros d'amende en cas d'atteinte à l'environnement et d'infraction en bande organisée. Les agents de l'Office français de la biodiversité (OFB), de l'Office national des forêts (ONF) et des réserves naturelles sont habilités à constater ces infractions. Enfin, les procédures judiciaires sont facilitées afin de permettre le transport des personnes mises en cause, les contrôles d'identité, les fouilles des embarcations et des véhicules.
Les ministres en charge de l'écologie et de l'outre-mer, Barbara Pompili et Sébastien Lecornu, se félicitent de ces dispositions dans un communiqué commun. « La forêt primaire en Amazonie (…) nécessite le meilleur niveau de protection contre les activités illégales qui entraînent des pollutions au mercure, toxique pour nos cours d'eau, et des défrichements irréversibles », se félicite Mme Pompili. Mais, dans le même temps, la majorité a rejeté des amendements déposés par les députés Delphine Batho (non-inscrite) et Guy Bricout (UDI) qui visaient à interdire les technologies les plus dangereuses utilisant du cyanure.
Montagne d'or
« Plus nous renforçons notre lutte contre l'orpaillage illégal, plus nous permettons à une filière aurifère durable et responsable de se consolider », se réjouit, quant à lui, Sébastien Lecornu. Il ne s'agit donc pas de mettre en place le moratoire sur l'exploitation minière industrielle en Guyane réclamé par la Convention citoyenne pour le climat, mais essentiellement de combattre l'orpaillage illégal. Une activité qui représente « une extraction aurifère cinq à dix fois plus importante » que celle des activités légales, précise la ministre de la Transition écologique.
« En inscrivant clairement dans la loi climat la possibilité de refuser un titre minier pour un motif environnemental, le code minier s'adapte enfin aux enjeux du siècle. C'est une grande victoire. Cette avancée devra maintenant permettre d'éviter toute nouvelle Montagne d'or », se félicite Pierre Cannet du WWF France, qui affirme toutefois rester très vigilant.